Les émotions, actrices de notre vie psychique

Les émotions ont longtemps souffert de leur mauvaise image. Mais, grâce aux sciences cognitives et aux neurosciences, elles sont aujourd’hui reconnues comme des actrices principales de notre vie psychique.

D’où viennent les émotions ?
Selon le psychologue et philosophe américain William James (1884), la réaction corporelle précède le ressenti émotionnel : c’est ainsi parce que nous sentons des frissons sur la peau que nous éprouvons de la peur.

En 1927, à l’inverse, pour les physiologistes Walter Cannon et Philip Bard les expériences émotionnelles naîtraient directement dans le cortex : c’est donc la conscience émotionnelle qui précéderait la réaction viscérale.

Aujourd’hui, nous savons que les émotions naissent dans la partie archaïque, la plus profonde, de notre cerveau, qui commence par le tronc cérébral et se prolonge par le système limbique (aussi appelé cerveau émotionnel).
Au sein de cet ensemble, se trouve l’amygdale, associé plus particulièrement à la peur, l’insula qui semble être en grande partie responsable des réactions de dégoût, les noyaux gris centraux qui s’activent quand la personne ressent de la joie et l’hippocampe où sont stockés les souvenirs d’événements émotionnels.
Schématiquement, une émotion fait appel à deux types de processus : l’un automatique et inconscient, et l’autre conscient et contrôlé.

Comment se manifestent-elles ?
Sa manifestation se décrit en cinq étapes : l’expression, la motivation, la réaction corporelle, le sentiment et l’évaluation cognitive.
Les 3 premières constituent ce que la personne donne à voir aux autres.
Le sentiment et l’évaluation cognitive se situent à un niveau moins visible. Le sentiment qui suit l’émotion est la représentation consciente d’un état particulier : il est plus diffus et plus durable que l’émotion plutôt brève et conceptuelle.

A quoi servent-elles ?
Darwin avait montré la fonction adaptative des émotions. Nous avons, toutefois, longtemps considéré les émotions comme des éléments imprévisible et irrationnels, les opposant aux fonctions plus « nobles » telle que le raisonnement.
Cette conception a beaucoup évolué avec les travaux du neuropsychologue Antonio Damasio qui a montré que les émotions permettraient aussi d’optimiser nos facultés mentales. Elles serviraient tout d’abord de guide à la prise de décision.
Mais au-delà de la prise de décision, elles servent aussi d’autres fonctions cognitives, notamment l’attention et la mémoire. Les émotions sont aussi un important vecteur de socialisation.

Sont-elle universelles ?
Dans les années 1970, le psychologue américain P. Ekmann a établi une liste de six émotions de bases : joie, colère, peur, tristesse, dégoût, surprise. Cependant, les recherches ne vont pas toutes dans ce sens. Il semblerait que les personnes d’une cultures donnée déchiffrent plus facilement les expressions émotionnelles des membres de leur propre groupe que celles des autres. Mais, au delà des différences culturelles, il existe de fortes disparités à l’intérieur d’une même culture.

Peut-on ne ressentir aucune émotion ?
La réaction émotionnelle est tout d’abord une réaction automatique. On ne peut donc pas ne pas ressentir d’émotions. Néanmoins, il existe des personnes qui décrivent des sensations physique sans pour autant les associer à des émotions. Nous parlons alors d’alexithymie. Chez les alexithymiques, les émotions sont bien présentes mais ne peuvent pas être mentalisées et identifiées


Source : Olano M., (2019). Les émotions en cinq questions. Sciences Humaines, 320, 36-40